11/02/2010
1m78 de talent
J'apprécie écouter de la musique lorsque je conduis car je déteste l'inconfort des balladeurs. Ma voiture offre un cocon tout aussi intime, où les mélodies et les mots peuvent résonner sans embêter personne. Le paysage défile, les paroles s'égrènent et j'ai la pleine conscience de ce que j'écoute. Un aller retour en Provence et je me suis attardée sur le dernier album de La Grande Sophie, « Des vagues et des ruisseaux ».
Depuis 1996, date de son premier opus, elle a imposé son style pop un peu décalé mais surtout très personnel. Adepte d'une musique home made et artisanale, elle définit son travail comme une sorte de tâche quotidienne sa « kitchen miousic » comme elle aime la nommer. Des mots percutants qui égratignent souvent la condition humaine, une personnalité généreuse et parfois déjantée, une musique tour à tour douce et pétulante… quelques ingrédients qui font de cette chanteuse une figure attachante du paysage musical français. En 2001, son album « Le porte-bonheur » séduit mes oreilles et deux titres accrochent particulièrement mon attention : Martin et Des roses rouges. Deux ans plus tard, elle obtient une large reconnaissance de la critique et du public avec « Et si c'était moi » qui lui vaudra, en 2005, d’être couronnée Révélation scène de l'année aux Victoires de la Musique. Sans se prendre au sérieux, La Grande Sophie possède un sens de l’humour et de l’improvisation qui l’entraîne parfois dans de douces folies scéniques.
Rien que la pochette annonce le changement de cap ; au revoir l’image d’adolescente attardée, c’est la femme qui parle et se libère. Ce dernier album reflète sans conteste le besoin de faire une pause, de souffler… avec des chansons plus intimes, des textes personnels et une certaine convention que d’autres pourront lui reprocher (reprise d’une chanson de Barbara, une valse à trois temps…). En ce qui me concerne, j’ai apprécié d’autant plus que l'album précédent m’avait un peu laissée de marbre avec ses orchestrations trop présentes et lestées d’un manque de subtilité. Ici, les mélodies sont claires, chaque note résonne dans son intention propre laissant place à une voix pure et directe. Les textes la dévoilent, parlant d’amours déçues mais aussi de pardon. Pas de superflu, pas de risque, pas d’exubérance…. On perd un peu de son identité mais ce qu’elle offre est une autre Sophie, toute aussi Grande, qui charme les oreilles. N’est-ce pas ce qu’on attend en premier d’un artiste ?
Face au marketing acharné de la Saint-Valentin qui inonde ma boite mail de spams, j’ai envie de me réfugier dans ce bouquet là de Roses Rouges :
13:57 Publié dans Les oreilles | Commentaires (0) | Tags : la grande sophie
09/02/2010
Deux jours à tuer
C’était un soir d’octobre 2003 à l’Olympia, un tabouret au centre de la scène et Serge Reggiani qui susurre ses succès comme un adieu. Ca aurait pu être pathétique mais c’était juste émouvant. Le temps qui reste est compté et les paroles de cette chanson prennent un sens tout particulier. Alors quand Jean Becker la choisit pour illustrer Deux jours à tuer, je me dis que le film a des chances d’effleurer des sujets qui me touchent.
Deux jours à tuer est une adaptation du roman de François d'Epenoux dans lequel on retrouve les valeurs universelles et les thèmes chers à Jean Becker, la vie au contact de la nature, l'émotion des petits riens, la fragilité et la profondeur des liens humains.
Antoine est un publicitaire reconnu, heureux en famille et en amitié. Un jour comme les autres, pourtant, sa vie bascule. Il commence par saboter un rendez-vous avec un client puis, en l’espace d’un week-end, il se met à détruire tout ce qu’il a construit pendant des années. La crise de la quarantaine ? Un excès de folie ? Qui sait …. ? La réponse à ces questions est censée se trouver à la fin du film dont l'écriture évente un petit peu l'effet de surprise mais le mystère de son comportement m’a tenue jusqu’à la dernière minute. Preuve que ce n’est pas dans le suspens que réside l’essence du film.
Le première partie est brutale, dérangeante, nerveuse, jouissive parfois car on porte tous en soi cette envie de dire un jour à notre entourage, professionnel, familial ou amical, ses quatre vérités, au-delà de toute convention, de tout respect. Si le film commence comme une comédie (la belle-mère hautaine face au gendre excédé), celui-ci vire vers un malaise de plus en plus palpable, notamment lorsque le personnage s'en prend à ses enfants. C’est le tableau d’un homme qui, avant de partir, souhaite laisser l’image d'un type détestable qu'on ne regrettera pas avec le temps. La seconde moitié est portée par la plénitude qu’inspirent les paysages irlandais. Une approche qui porte l’empreinte de son réalisateur, personnelle et contemplative, sur les rapports entre un père ermite et son fils qui se retrouvent après des années de silence. Peut-être emporté par sa propre histoire, Becker rationalise un peu trop la fin du périple… mais ce qui réunit ces deux ambiances, c’est l’appétit de la vie et les questions qu’elle soulève.
Sur quoi construit-on sa vie ? Comment en être les acteurs ? Comment gérer la peur du vide ? Combien de temps nous reste-t-il pour accomplir nos rêves ? Comment pardonner ? La vie est un jeu de dupes pour qui se laisse duper…
Un Albert Dupontel qui incarne le personnage plus qu’il ne l’interprète (nominé aux césars), des seconds rôles sobres mais entiers, des dialogues ciselés parfois trop maîtrisés mais souvent jubilatoires, une émotion tendue et maîtrisée qui ne tombe pas dans le pathos (la fin abrupte, comme si l'essentiel venait d’être dit, évite de justesse le sentimentalisme)… voilà sans doute les ingrédients d’un film qui m’a touchée et dont l’émotion s’étire dans les mots de Reggiani en générique de fin.
Sur un sujet proche, je ne peux m’empêcher de rappeler Ma vie sans moi d'Isabel Coixet, un des plus beaux films que j’ai vus et dont la subtilité poignante donne une sensation de la vie, pleine et entière.
20:40 Publié dans Les yeux | Commentaires (0) | Tags : serge reggiani, deux jours à tuer, jean becker, albert dupontel, isabel coixet, le temps qui reste
04/02/2010
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"Si le recevoir est au centre, le don est en haut,
le refus en bas.
Reste encore, de part et d'autre,
le dépouillement qui agrandit, la tolérance qui enrichit"
13:25 Publié dans Essentiel | Commentaires (0)